Désormais,depuis le 25 mars 2015, l‘Office européen des brevets peut octroyer des brevets pour des légumes. Ce brevet peut être accordé dans le cas ou une firme découvre une propriété particulière à un légume et demande donc un brevet pour cette propriété, brevet qui va s’étendre à toute plante pour laquelle la propriété s’applique.
Un droit de propriété intellectuelle sur les plantes
Les demandes de brevet proviennent des grandes firmes agro alimentaires, pour la grande majorité, concernent des plantes non génétiquement modifiées et, à ce jour, plus de 1000 demandes ont été déposées auprès de l’Office européen des brevets.
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Si on prend l’exemple du brocoli et de sa propriété anticancéreuse, la firme obtiendrait donc, via un brevet, un monopole temporaire sur le brocoli en lui même mais également sur le caractère anti cancer qui pourrait être adapté à d’autres plantes possédant la même caractéristique génétique.
On vient donc ainsi de définir un droit de propriété intellectuelle sur les plantes et semences.
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Plant Bioscience, firme agro alimentaire, a ainsi croisé du brocoli sauvage avec du brocoli cultivé et obtenu un droit de propriété de 20 ans sur la nouvelle espèce crée. Donc les agriculteurs qui voudraient cultiver cette espèce devront obtenir l’accord de Plant Bioscience et s’acquitter d’une redevance.
Les petits cultivateurs, premières victimes
Le risque est majeur pour les petits cultivateurs qui risquent alors d’être poursuivis par les grandes firmes au titre de contrefaçon comme c’est d’ailleurs déjà le cas pour les semences OGM.
Le brevet va impliquer :
- l’interdiction de créer une nouvelle variété,
- l’interdiction d’utiliser la plante à des fins expérimentales,
- l’interdiction de ressemer son champ après récolte.
Pour Corinne Lepage, avocate, ancienne députée européenne écologiste-centriste, cette Loi vient en contradiction avec le droit communautaire et il y a confusion entre la découverte et l’invention. C’est également un grand frein à la recherche puisqu’il sera impossible, sauf accord et redevance, de travailler sur les espèces brevetées dans le cadre de protocole de recherche.
La privatisation du monde naturel
Les Européens veulent emboîter le pas desAméricains. En effet, la grande chambre de l’Office européen des brevets (OEB) vient de reconnaitre des brevets du vivant sur le croisé d’un brocoli sauvage avec un brocoli cultivéouune tomate obtenue par des méthodes de sélection classique. Ainsi, les agriculteurs qui veulent explorer les semences de ce brocoli doivent signer un accord avec l’entreprise agroalimentaire Plant Bioscience. Grâce à ce brevet, l’entreprise Plant Bioscience possède un monopole temporaire d’exploitation. Il est valable pour une durée de 20 ans. Un paiement de redevance est obligatoire pour éviter les lois contre la contrefaçon.
Les retombés négatifs de cette décision
Cette décision de la grande chambre de l’Office européen des brevets peut se répercuter sur les cultivateurs. Ces derniers sont toujours obligés de payer une redevance auprès des grandes firmes pour avoir le droit d’explorer un droit de propriété intellectuelle sur les plantes et semences. Par ailleurs, le principe de brevetabilité permet de privatiser le vivant. Ce processus bloque la recherche, car le produit breveté ne peut pas être commercialisé sauf que le détenteur donne l’autorisation. Un chercheur doit toujours bien vérifier si les plantes sont « libre de brevets ». Le coût de la recherche est de plus en plus onéreux.
La recherche devient ainsi compliquée et elle est freinée par le système de brevetage des plantes. Il verrouille l’accès aux ressources génétiques. Il provoque des conséquences sur l’économie des semences européennes. De plus, ce brevet modifie le rapport de force dans le monde agricole. Le brevetage des plantes vivantes se répercute sur l’appauvrissement de la biodiversité cultivée. En effet, il augmente également le coût de la semence. Avec cette décision de la grande chambre de l’Office européen, les grosses entreprises renforcent leur domination sur le marché alors que les petits cultivateurs sont doublement écrasés par une interdiction de créer une nouvelle variété et l’interdiction de ressemer son champ après récolte. Elle provoque une grande rupture sur la conception du vivant alors que les êtres naturels sont des produits en commun.
L’extension des droits de propriété et la remise en cause de propriété corporelle et territoriale effrayent la biodiversité. La chaîne alimentaire est privatisée avec cette technique de brevetage des vivants. Les titulaires du brevet privilégient des semences associées à des herbicides alors que les petits agriculteurs sont de véritables acteurs de la biodiversité. Ils jouent un rôle important sur l’unicité, la globalité du monde vivant sans oublier sa variabilité.
Cette loi est notre gros coup de gueule du mois !